Le Meilleur du "Peer"

Par Florent - 24/08/2005
Enquête "Le téléchargement sur les réseaux de pair à pair"
Le Département des Etudes, de la Prospective et des Statistiques (DEPS) du Ministère de la Culture et de la Communication, vient de réaliser une enquête sur l’usage par les internautes des outils Peer-to-peer, pour le téléchargement de produits culturels. Une étude loin des cris d’orfraies que son ministre poussait jusqu’alors.

L’enquête confirme ce que l’on savait déjà. Le téléchargement, que l’on comprendra sous l’acception "illégal", via les plateformes P2P, est plus fréquent pour les gros adeptes d’Internet, notamment les jeunes (15-24 ans) et les hommes. Plus on maîtrise les outils informatiques, mieux on connait les services disponibles sur le Net mais non préinstallés par une multinationale quelconque. Cela est aussi problablement accentué par un effet de groupe chez les jeunes, pour qui l’illégalité de ces pratiques semble plus banalisée.

Les motifs évoqués par ces corsaires des réseaux sont :
-  l’exploration des terres vierges de la création, de ses populations d’artistes inexercés, mais aussi des nouveaux opus des anciens indigènes déjà acclimatés ;
-  le large océan de produits offert à leurs filets, digne d’une FNAC en ligne ;
-  la simplicité d’appropriation de ces bijoux, puisque que la caravelle dont on fouille les cales vient à soi.

Mais d’autres données échappent aux idées reçues ou aux conclusions hâtives. Ainsi, la pratique, tant médiatisée, n’est pas si généralisée, puisque seulement moins d’un tiers des internautes avaient téléchargé un fichier ou plus dans le mois précédent l’entretien. Mais, il est vrai que les jeunes, qui représente 39% des téléchargeurs (contre 27% des internautes) sont aussi les clients cibles des industries culturelles du jeux, de la musique et du cinéma. Toutefois, la solution de taxer les forfaits Internet pénaliserait donc plus de 2/3 de la population des surfeurs, et risquerait même d’inciter ceux-ci à braver la vague du téléchargement gratuit.

Autre croyance contestée, au grand dam des apôtres de l’Internet libre et communautaire, pour qui le P2P permet de créer un espace de libre échange non commercial, les internautes indiquent qu’ils n’utilisent pas cette technologie pour partager leurs données. Il s’agit donc d’une pratique individuelle et individualiste. La communauté des adeptes de Kazaa, eMule et compagnie n’ont pas de liens réels entre eux, atteignant l’aporie quand ils téléchargent allégrement les fichiers des autres, sans mettre à disposition les leurs, histoire de ne pas se faire prendre.

Enfin, les pirates assoiffés de sons ne se jettent pas sur la première victime venue. Le couplage des types de fichiers semble rare. Un mélomane ne téléchargera pas de film sous prextexte de gratuité. On ne télécharge pas n’importe quoi et à tout va, on se spécialise. Soit on pirate la musique, soit le ciné, soit les jeux, mais pas l’un et l’autre. La présence dans les rayons d’Internet d’une quantité incommensurable d’oeuvres gratuites ne pousse pas à la dispersion.

Le piratage n’apparaît donc plus ici comme la dague dans le corps agonisant de l’industrie musicale et cinématographique. Si le téléchargement réduirait l’achat et la location de supports (DVD, CD, jeux vidéos), il favoriserait en revanche la consommation du cinéma en salle et des concerts. Il participerait non pas à une mort du système, mais à une crise d’évolution.

Ce constat engendre deux conséquences. D’abord, l’augmentation de consommation des produits artistiques favoriserait la soif de vivre en "direct" et collectivement des émotions culturelles. Peit-être une envie de partager ses sentiments, ou de ressentir en vrai ces créations artistiques vivantes. Ensuite, cette suracquisition, bien que gratuite, prouve qu’il existe une envie de consommation culturelle non satisfaite. Cette remarque devrait être étudiée par les majors, puisque plutôt que de croire que le marché stagne à cause du piratage, ils pourraient réfléchir à comment répondre aux envies de ces prospects (élargissement de l’offre, réduction des prix, ergonomie des espaces de téléchargements légaux, etc).

Le discours du ministère de la Culture semble avoir évolué. Bien sûr on peut mettre cela sur le compte de la franchise des statisticiens, qui ne peuvent faire mentir les chiffres. Mais cette publication n’aurait sans doute pas pu avoir lieu si les esprits du cabinet minitériel, et probablement du gouvernement n’avait pas évolué. Cela est également accentué par la création concomitante de l’Observatoire des usages culturels numériques, qui semble indiquer que le téléchargement des fichiers numériques à contenu culturel n’est plus uniquement vu sous l’angle de la répression judiciaire mais aussi celle de la recherche de compréhension. Observatoire à étudier donc...

Synthèse de l’étude dans le "Développement culturel" de juin 2005 : http://www.culture.gouv.fr/culture/...


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